Histoire du karaté de style shito ryu



Tous ceux qui ont approché de près ou de loin le karaté, savent qu’il est originaire d’une petite île de la mer de chine dépendant de l’archipel des Ryukyu appelé Okinawa et qui, à titre de comparaison, a une taille proche de la Martinique.


 

         Pays de tradition orale, on n'a malheureusement pas de trace écrite de l’histoire du Karaté avant le XIXème siècle .A l'exception peut -être de quelques formes de luttes  locales , on  ne trouve pas de trace d'un art de combat  à mains nues au XVème et XVIème siècle…Ce n’est donc pas comme prétendait la légende ,l’interdiction des armes par un roi des Ryu Kyu au XVème  qui a engendré la pratique du Karaté.
De même, le karaté n'était pas non plus  un art guerrier susceptible  de combattre sans arme les envahisseurs Japonais.
On pouvait en effet difficilement imaginé un "paysan "affrontant  à mains nues les redoutables bushis japonais maîtres dans le maniement des armes blanches.

La population d'Okinawa étant rurale, le karaté n'est probablement pas issu du peuple mais sans doute des milieux aristocratiques locaux.


        

       

       Ce qui est sur, c'est que le TO De ( nom originel du karaté) a été fortement influencé par les arts martiaux chinois, d'une part parce que l'île a souvent, été sous leur domination, mais également parce qu'il existait un quartier chinois appelé Kumé, dont on suppose que certains dignitaires pratiquaient les arts de combat à mains nues ramenés de leur pays. L'île d'Okinawa était, en outre, une plate forme commerciale vers la Chine du Sud et on retrouve certains liens entre les katas de karaté d'Okinawa et les Tao des styles de "kung Fu" issus des formes du Sud de la Chine.


 

     

 

 

                                                                                      

 

 

 

 

 

       

 

 

 

        On sait également depuis les années 1970 que la noblesse de Ryu Kyu pratiquait une forme de combat à mains nues appelée Udon Té (la main du palais) que l’on retrouve aujourd’hui à Okinawa sous le nom de Motobu –ryu. Cette forme de « To dé » transmise secrètement aux aînés des familles nobles utilisait de nombreuses techniques de luxations et de projections. Elle a été perpétuée au XXe siècle par la famille MOTOBU. Sa divulgation était tellement restreinte que même Choki Motobu, l’un des pères du Karaté avec Maître FUNAKOSHI ignorait sans doute en tant que cadet, cet art ancestral.

 

On peut donc en déduire que les échanges avec la chine ont permis au fil du temps, à partir du XVIIème siècle, de former les ébauches du karaté. Certains diront qu’il existait une forme ancestrale de combats à mains nues pratiquée secrètement par la noblesse de l’Ile et qui mêlée au styles chinois a finalement formé le « To dé », d’autres qu’il est l’évolution locale des arts martiaux chinois importés par des voyageurs et des dignitaires chinois.

 

Quant au Motobu- Ryu, il ne ressemble pas au Karaté habituel que ce soit dans l’exercice des katas (le kata de base est sanchin mais bien différent des styles du Nahate) ou des techniques de base ou des techniques avec armes.

 

Le plus intéressant, c’est de comprendre comment une discipline, longtemps secrète et pratiquée par quelques gens issus d’une noblesse insulaire perdue dans la mer de chine, a pu devenir un art de combat reconnu aujourd’hui au niveau mondial.

 

Selon la légende ,le plus ancien maître de To De connu serait Kanga Sakugawa (1782- 1865 ?) il aurait reçu l'enseignement d'un chinois nommé Kwan Chan fu  dont le nom pourrait être à l'origine du  kata Kushanku ou kusukun ( Kanku daï pour le shotokan) 

 

L’essor du To dé commence ainsi au XIXème   et c’est un jeune noble, garde du palais, Sokon MATSUMURA (1809-1899) à qui on doit la création du Shuri Té, nom donné à son école qui se trouvait dans la ville de Shuri. On dit qu’il fût l’élève de SAKUGAWA (voir plus haut) mais selon la tradition, c’est un chinois du nom d’IWA qui lui enseigna l’art de combat chinois. Une variante de son école se créa dans le village d’à côté du nom de Tomari (école Tomari Té). Le Kata Tomari Bassaï nous vient de cette école.

Aujourd’hui, le Shotokan, le Shorin Ryu sont issus du Shurité, ainsi que le Wado ryu, même si son créateur (Maître Otsuka , élève de Funakoshi a intégré en tant qu’expert de ju jitsu ses propres techniques).

Le tomari té n’a pas donné de styles spécifiques, la différence par rapport au shurité résulte de l’introduction dans les katas de mouvements artistiques provenant peut-être de danses locales.

 

Parallèlement, le petit village chinois de Kumé s’est peu à peu intégré à la communauté d’Okinawa et est devenu la ville de Naha. Il s’est, alors, développé une forme de To Dé appelée Naha Té. On retrouve donc au début du XXème siècle , deux courants de Todé, le shorin (Shurité et Tomarité) et le shorei (le Nahate).

 

Le Goju ryu, l’Uechi Ryu sont issus du Nahate

Le shito- ryu a, quant à lui, intégré les deux courants Shorin et Shorei. Il est probable que les deux premiers katas du karaté furent Nai fanchi (ou Nai hanchi) et Kusukun(ou kushanku) pour le courant shorin et Sanchin pour le courant Shorei. Ces deux premiers katas ont donné plusieurs formes aujourd’hui et on a malheureusement perdu le kata Nai fanchi original , les trois nai fanchi shodan , nidan et sandan étant probablement les divisions du premier. Issus des formes chinoises, ils étaient probablement très longs et peu adaptés à une diffusion grand public.

On suppose aussi que le Sanchin pratiqué par le style Uechi ryu (mains ouvertes) est sans doute le plus proche du kata d’origine.

 

Le To dé a donc commencé à se développer à Okinawa grâce à son introduction dans les écoles comme méthode physique éducative. On le doit à Maître Itosu, le professeur de Gichin Funakoshi et expert en Shurité. Pour cela, Maître Itosu a crée à partir du kata kushanku des formes codifiées plus accessibles pour les enfants et l’un de ses élèves, Maître Hanashiro a remplacé certaines techniques mains ouvertes par les poings fermés, car jugées plus faciles et moins dangereuses.

 

Ainsi furent nés les 5 katas Pinan de base. On lui doit probablement aussi les trois katas nai fanchi qui étaient enseignés après l’apprentissage des pinan.

 

C’est important car les bunkai qui en découlent sont nécessairement des techniques d’application simples puisque destinées à l’origine à des enfants.

 

Toutefois, on doit principalement le développement du To dé en dehors d’Okinawa à Gichin Funakoski et Jigoro Kano, le père du Judo

 

 Maître Gichin Funakoshi (1868-1957) n’était probablement pas le meilleur karatéka de son époque mais il avait un gros avantage : il était lettré (il était instituteur à Okinawa) et cultivé. Il fut donc désigné pour effectuer une démonstration devant le prince impérial en 1921 puis fut envoyé au Japon l’année suivante pour une nouvelle démonstration à kyoto. Le karaté aurait pu s’arrêter là et rester une méthode d’éducation physique locale. Mais Funakoski est remarqué par Jigoro Kano qui en plus d’être le père du judo exerce des fonctions à un haut niveau de l’état au niveau du ministère de l’éducation nationale. Ce dernier l’invite au célèbre kodokan. Encouragé par Maître Kano, Maître Funakoshi décide de rester pour enseigner.

On remplaça l’ancienne « main d’Okinawa » (Okinawa Té ou To dé) par Kara Té (main de chine). L’idéogramme fût par la suite remplacé par la « main vide » compte tenu des tensions politiques entre le japon et la chine. Après des débuts difficiles, il construisit son propre dojo (salle d’entraînement) et l’appela Shoto Kan (qui signifie littéralement la maison de shôto, son pseudonyme en tant que calligraphe et qui veut dire bruissement du bois.  Me FUNAKOSHI transforma également les termes d'Okinawa en termes japonais. Ainsi les Pinan devinrent les Heian ( en inversant le shodan et le nidan), Kushunku devint Kanku , Nai han chi devient Tekki et ainsi de suite....

 

Kenwa Mabuni est né dans la ville de Shuri, il est de vingt ans le cadet de Funakoshi et il suit dès l’âge de 13 ans l’enseignement de Maître Itosu.

Plus tard, lorsqu’il travaille comme enseignant vacataire, il se lie d’amitié avec Maître Myagi, expert en Naha té et futur créateur du Goju ryu. Ce dernier l’introduit auprès de son Maître Higaonna.

 

C’est à partir des deux enseignements que Maître Mabuni va créer le style Shito Ryu en 1938. Comme pour Maître Funakoshi, c’est grâce à Jigoro Kano de passage à Okinawa en 1926 qu'il part au Japon pour enseigner sa discipline, à partir de 1928.

 

Le terme shito est en fait l’idéogramme des noms des deux maîtres qui ont enseigné à Mabuni, Itosu et Higaonna.

 

 

                                      

 

 

 

 

 

Le développement international du Karaté va se faire après le décès de ces grands maîtres (Mabuni en 1952, Myagi en 1953 et Funakoshi en 1957) à partir de années 1960.

 

De nouveau, le Karaté aurait pu rester une discipline nationale marginale car après la seconde guerre mondiale, les groupes se divisent.

En Shotokan, Maître Funakoshi perd à la fois son épouse et son fils Yoshitaka, à qui il avait confié la destinée de l’école. La J.K.A , Japon Karaté Association voit le jour en 1949 avec à sa tête Maître Funakoshi mais des divisions se créaient entre les partisans du karaté moderne, sportif et ceux du karaté traditionnel (qui exclut les kumité).

 

Pour le shito ryu, Maître Kenwa Mabuni avait déjà accepté de son vivant que certains de ses élèves comme Maître Tani pour le shukokaï ou Maître Sakagami pour l'Itosu Kaï évoluent vers d'autres formes du style.

A la suite du décès prématuré de Maître Mabuni en 1952, certains de ses disciples n'ont pas souhaité poursuivre avec le nouveau et jeune soke, Keneï Mabuni qui a repris en tant qu'aîné de la famille  la succession de son père. Ainsi, Maître IWATA, plus jeune de quelques années s'orienta vers un shito ryu  plus sportif  au sein d'un groupe universitaire réuni  sous le nom de Shito Kaï, Maître Uechi retourna à Okinawa et Maître Kuniba s'orienta vers le seinchin kaï, le terme "Kaï", signifiant organisation.
Il en est de même pour le goju-ryu après le décès de Maître     Myagi, divisé en plusieurs branches et on vit aussi apparaître au japon des dérivées des écoles shorin (Kobayashi, shorinjy- ryu,…) ou shorei (shoreiji-ryu) puis des formes différentes comme le kyokushinkaî.

 

 

Le Karaté universitaire se regroupa en fédération (All Japon Karate do Federation), tandis que le karaté non universitaire se divisa en de nombreux groupes distincts.

 

A la mort de Funakoshi, le karaté moderne sportif fait son apparition avec les premiers championnats du japon de karaté shotokan organisés par la JKA , suivis rapidement par d’autres groupes.

 

A l’occasion des Jeux Olympiques de Tokyo en 1960, le ministère de l’Education Nationale oblige l’ensemble des groupes à se réunir au sein d’une fédération unique (la All Japan Karaté Do Association), ce qui permet de clarifier la situation sans résoudre les querelles internes.

Aujourd'hui , le Karaté est regroupé au sein de la JKF (l'équivalent de la Fédération Française de Karaté) qui est membre de la Fédération Mondiale de Karaté mais il existe toujours plusieurs groupes indépendants qui ne sont pas fédérés. La karaté d'Okinawa a également sa propre organisation.

 

La France fût l’une des nations pionnière à accueillir le Karaté à la fin des années 1950 grâce à Maître Henry Plée, qui fit venir des experts japonais comme Mochizuki, Murakami, Kasé, Oshima…..

 

Le style Shoto Kan est aujourd’hui majoritaire à plus de 80 % des pratiquants, suivis du Shito Ryu (toute famille confondue), du Wado Ryu et du Goju Ryu et de tous les autres de styles divers de karaté ...

 

Le shito ryu / shukokaï est arrivé au milieu des années 1960 par l’intermédiaire de Maître Yoshinao Nanbu mais ce dernier évoluait déjà vers sa propre recherche (il a crée le Karaté Sankukaï puis le Nanbu Do et le Nanbu Taiso) et finit par rompre avec son Maître ( Chojiro Tani).

 

Au début des années 1970, un jeune japonais, Nino Satoru, repris le flambeau. Elève de Shogo Kuniba et de Teruo Hayashi , l’enseignement de son shito ryu différait un petit peu de celui de  Mabuni Kenei. Reparti au Japon, c’est Maître Nakahashi qui a continué le développement du shito ryu à partir de la fin des années 1970. Il représente aujourd’hui le Shito Ryu de Keneï Mabuni au sein de la Fédération Française de Karaté . Il suit l’enseignement de Maître Mabuni fils. Le shukokaï , quant à lui ,qui est issu du shito ryu bénéficie d'un passage de grade différént au niveau des katas et une Coupe de France distincte du shito ryu et est représenté par plusieurs experts  de qualité au sein de la fédération dont Maître Kawanishi , Kamohara ou Omi...

Aujourd'hui , les branches issues du shito ryu sont nombreuses dans le monde et ont des noms divers, hayashi ha shito ryu, Tani Ha shito ryu, itosu ryu, Itosu kaï, seinchin kaï ,shito kaï...
On retrouve ces différences dans les katas et même si aujourd'hui, on tend  à uniformiser les techniques, on constatera quelques variantes  selon qu'on appartient à  telle ou telle branche.

 

Au sein des Pays de Loire, le Karaté Shito Ryu est représenté par Maître Eiji Kawanishi expert fédéral 8E DAN qui enseigne dans la région Nantaise. Ancien champion du Japon de Karaté, Maître Kawanishi a été l’élève direct de Maître Tani (fondateur du Shukokaï). 

 

Sur un plan général, en France, la Fédération Française de Karaté et Disciplines Associées est la seule organisation qui a délégation de pouvoir pour notre discipline.

Il existe d'autres organismes indépendants oeuvrant pour le développement du karaté  mais ils ne bénéficient pas de délégation de l'état. 
 

Ces scissions qui ont souvent des origines politiques ou idéologiques sont certes regrettables pour les pratiquants mais il convient les relativiser  dans la mesure où dans d’autres pays comme le Japon ou les Etats-Unis, les groupes indépendants sont  tès nombreux, plus ou moins bien organisés, alors que le Karaté et ses disciplines associées restent en France avec plus de 200 000 licenciés officiels une organisation bien structurée et développée.

 

Il n'existe par ailleurs pas un Karaté sportif opposé à un karaté traditionnel. Le Karaté est un tout et au sein de l'AVKS, nous essayons d'apporter à nos adhérents à la fois un art martial complet avec comme objectif, l'épanouissement de chacun dans l'effort physique sans esprit de compétition ou de performance et un sport riche et physique avec la recherche de l'amélioration physiologique et de la confrontation dans le cadre de la compétition.

 

 


 
 



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